J’ai donc commencé mon épopée le lundi 22 avril, au volant de ma Renault Scenic, à tirer ma splendide caravane nommée Mariette.
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Vous l’aurez sûrement remarqué, l’Europe a été traversée d’un vent polaire, qui devait normalement durer jusqu’à la fin du mois d’avril.
Fermez les yeux, et imaginez : vous êtes dans une caravane, en Normandie, en bord de rivière. L’humidité est à son comble, il y a de la buée à vos fenêtres. Vous vous endormez au chaud, car le chauffage a tourné, mais pour des raisons de sécurité, et sonore, vous devez le fermer quand vous dormez. Vous vous réveillez alors transi.e de froid, avec pourtant trois couvertures sur vous. Le thermomètre de la caravane indique 4°C. C’est plus froid que dans votre frigo. Pourquoi s’être donc embêté à prendre l’électricité pour faire fonctionner ce frigo ? Il fait d’ailleurs tellement froid, qu’au lieu de fonctionner normalement, votre frigo congèle, littéralement.
Même si tout ce que je viens de dire est entièrement vrai, pour rien au monde je n’aurais fait demi-tour. J’ai trouvé des techniques pour parer le froid, et suis passée experte dans l’art de me saucissonner dans les couvertures. Le premier camping où je devais normalement ne rester qu’une nuit, fut finalement trois nuits, tant je m’y plaisais. J’étais installée au cœur de la Suisse-Normande, un paradis pour randonner et escalader.
Le camping suivant, où je pensais rester au moins deux nuits, n’en fut qu’une, et je l’ai quitté à la hâte.
Je suis maintenant installée dans un magnifique endroit. Je pense que son prix le rend déjà très beau, mais sa vue le rend encore plus beau, car je suis à Arzon, dans le sud de la Bretagne, avec ma caravane face à la mer. Heureusement, ici les nuages passent vite, alors quand bien même il ne fait que 12°C, au moins c’est 12°C avec du soleil.
Je ne suis clairement pas encore passée pro dans l’art de manier une caravane, et essaye toujours de m’arranger pour prendre des emplacements où, lorsque je me gare, je dois juste la décrocher de ma voiture, et c’est bon. Seulement ici, les emplacements sont en pente. J’eu le bonheur de trouver un emplacement plus ou moins droit, avec vue. Au moment de décrocher ma caravane, je n’avais pas remarqué que son derrière était orienté vers une pente. Ma caravane a alors commencé à partir, et je me suis jetée dessus pour la retenir de toutes mes forces. Heureusement, elle pèse moins de 750 kg, et Bruno, responsable du camping, est arrivé pour m’aider. Il m’a alors raconté sa vie tout posément, comme quoi il adorait les belges, comment il s’est retrouvé à travailler ici etc., tout ça, pendant que je tentais comme je pouvais, de retenir ma caravane de partir, car ni lui ni moi ne faisions un geste pour mettre le frein, et je n’osais pas l’interrompre. C’est le genre de moment où on peut voir passer les mouches.
Tout s’est bien fini, Mariette est bien installée, et ne va clairement pas bouger pendant les prochains jours.
Je me suis lancée un petit défi ces derniers jours, celui de couper tous les réseaux sociaux. Instagram, Whatsapp, Facebook… J’ai tout enlevé. Le plus dur, ce sont les messages. Je trouve qu’il n’y a rien de plus frustrant que de vivre un moment, comme l’histoire de la pente avec Bruno, et de n’avoir personne avec qui en rigoler ensuite. Du coup, j’apprends à rire seule. Je me suis retrouvée l’autre jour à me bidonner en repensant à un moment avec une amie. Tout d’abord, j’ai pensé que j’avais l’air complètement folle, seule dans ma caravane à rire aux larmes, puis j’ai réalisé comme ça m’avait fait du bien.
Lorsqu’on voyage seul.e, c’est difficile de trouver des personnes avec qui rire. C’est facile d’avoir des gens avec qui parler de la pluie et du beau temps, sur le coin d’un comptoir. Par contre, rire vraiment avec quelqu’un, ça demande un peu plus de temps. Alors je ris seule, et ça me va très bien comme ça pour l’instant, mais j’aurai bientôt besoin de connecter plus profondément avec d’autres personnes.
Je vous quitte avec une citation qui me plairait bien comme épitaphe :
“Comme une journée bien remplie nous donne un bon sommeil, une vie bien vécue nous mène à une mort paisible.”
Léonard de Vinci